Parmi les mentions obligatoires devant figurer sur une facture se trouve le numéro SIRET du fournisseur ou du prestataires de services.
Naturellement, la mention du numéro SIRET d'un tiers est interdite...
C'est pourtant ce qu'une prestataire de services a fait durant plusieurs années à son ex-concubin (et accessoirement le père de ses enfants), dans le but de lui faire payer les impôts et cotisations sociales afférentes au montant facturé.
Un contribuable, que nous appellerons Pierre, est venu à mon cabinet après l’échec de sa réclamation fiscale auprès de l’administration fiscale.
L’histoire semblait assez invraisemblable.
Son ex-compagne, dont la moralité était visiblement douteuse et que nous appellerons Mme X, intervient en tant que prestataire de services dans le domaine pharmaceutique.
Sans doute dans le but de ne pas s’acquitter des charges fiscales et sociales liées à l’exercice de toute activité professionnelle, Mme X n’a pas déclaré son activité aux organismes fiscaux et sociaux.
Afin d’émettre des factures, elle a alors eu la brillante idée de les émettre au nom de l’agence immobilière de son ex-compagnon, fermée depuis 2009. Le numéro siret mentionné sur la facture correspond par ailleurs également à cette agence.
Les clients n’ont visiblement pas réalisé que cette agence exerçait l’activité d’agence immobilière et était par ailleurs fermée depuis plus de dix ans.
Le subterfuge ne s’est pas arrêté-là.
Bien que fermée depuis 2009, l’agence disposait encore d’un compte bancaire dormant que Pierre avait visiblement oublier de clôturer. Mme X, connaissant les codes d’accès en ligne à ce compte, invitait ses clients à lui régler ses factures sur ce compte.
Mme X, s’empressait alors d’effectuer un virement du même montant à partir de ce compte sur un compte qui lui était personnel.
Les sommes facturées et transitant par l’intermédiaire du compte de Pierre s’élevaient à presque 200 000 € sur quatre ans.
Contrôle fiscal et proposition de rectification
L’administration fiscale procéda alors à un contrôle fiscal de Pierre. Elle estima que l’agence de Pierre était bien à l’origine de cette facturation et rehaussa son résultat imposable. Il en résulta un complément d’impôt sur le revenu et de TVA.
Pierre effectua alors, avec l’aide d’un conseil, une réclamation afin d’expliquer l’erreur à l’administration fiscale.
Cette dernière la rejeta au motif notamment :
Que Pierre ne justifiait pas que son agence n’avait pas réalisé les prestations litigieuses
Qu’il était libre de disposer des sommes comme il l’entendait et que rien ne prouvait que Pierre n’avait pas volontairement transmis ces sommes à Mme X
Voici un extrait du rejet de cette réclamation :
Saisine du tribunal administratif
Pierre contacta alors mon cabinet qui lui proposa naturellement de contester le rejet de cette réclamation devant le Tribunal administratif.
Prouver que Pierre n’avait pas réalisé les prestations litigieuses constituait une preuve négative. A mon sens, l’administration fiscale ne pouvait exiger cela de Pierre. Des courriers provenant des clients concernés attestant que seules Mme X est toujours intervenue dans les diverses prestations ont néanmoins pu être réunies.
L’argument tiré de la libre disposition des sommes invoqué par l'administration avait un peu plus de sens. Il est vrai qu’à partir du moment où des sommes sont présentes sur un compte bancaire dont un contribuable dispose du pouvoir de retirer les fonds quand il le souhaite, ces sommes sont réputées constituer un revenu disponible et sont donc en principe imposables.
Certes, nous pouvions aisément prouver que ces sommes avaient été transférées sur un compte personnel de Mme X.
Mais nous craignions que le Tribunal fasse droit au raisonnement de l’administration fiscale et considère que ces sommes avaient en réalité fait l’objet d’une don manuel (remise d’une somme d’argent ou d’un bien corporel qui ne nécessite pas d’acte notarié). Or, les dons manuels ne requièrent pas l’acceptation du bénéficiaire pour être valable. Par ailleurs, un don manuel ne nécessite pas nécessairement un écrit.
En revanche, les dons manuels, comme toute donation, nécessitent une intention libérale de la part du donateur.
Or, Pierre avait porté plainte plusieurs fois contre Mme X (pour des faits notamment de harcèlement et pour avoir souscrit des emprunts bancaires et des engagements de caution au nom de Pierre).
L’intention libérale semblait alors difficilement prouvable par l’administration fiscale qui fut alors contrainte de délivrer un avis de dégrèvement.
Tout est donc bien qui finit bien pour Pierre même si tout cela lui aura naturellement généré un stress dont il se serait bien passé...
Le cabinet de Me Nicolas Rozenbaum se tient à votre disposition pour toute demande fiscale en cliquant ici.
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